L’échelle du déchet




La visite du Port Autonome de Strasbourg et du RET, Rhine Europe Terminals nous a permis de prendre conscience des quantités de matières, de produits et de matériaux qui circulent à travers la ville. Strasbourg étant une ville portuaire connectée à Rotterdam via le Rhin, les conteneurs contiennent des tonnes de produits.
2ème port fluvial français le terminal manutentionne, stocke, entretien, répare, gère la logistique de toutes ces matières et produits.
54 000 tonnes de vrac manutentionnés/an.
600 à 700 camions par jours qui viennent au terminal.
15 rotations de trains par semaine.
12 rotations de barges par semaine.



Un conteneur, de la marchandise au déchet


Les formes de conteneurs de tri sont pléthoriques, le conteneur se décline sous une multitude de formes et nous constatons un jeu de voyelles entre le container (shipping container) et le conteneur de tri de déchets urbain.

Ce jeu sémantique entre container maritime apportant de la marchandise et le conteneur de déchet trié et fort en symbolique comme si ces marchandises qui deviennent des matières apparaissent et disparaissent dans des contenants hors sol.
Formellement une grande similitude existe également entre les containers et les conteneurs, le métal, les couleurs, et les formes sont identiques. Beaucoup d’efforts esthétiques ont été fait dans les nouveaux conteneurs en matières plastiques ou de biodéchet par exemple, mais ce vocabulaire formel reste industriel et lié à la logistique.

Le monde du container maritime est titanesque, pour prendre conscience de ce gigantisme, décrivons plus grand porte-conteneurs du monde, le MSC Gülsün, avec ces 400 mètres de long dépasse la hauteur de la tour Eiffel et peut embarquer, par exemple, 386 millions de paires de chaussures ou 47 512 voitures…
Le conteneur est une sorte de non-objet, objet posé en site urbain ou péri urbain, il est un espace de décharge organisée. L’usager vient y déposer ses détritus après les avoir soigneusement triés. Venir au conteneur est un acte volontaire, d’ailleurs ces objets sont nommés des lieux d’apports volontaires. Il y a une notion d’effort dans cette démarche de tri.
Pourtant ce conteneur est voué à être vidé et rempli indéfiniment, il ne fait que délimiter un espace, un parallélépipède ; il définit un cubage. Cette matière est ensuite transvasée sur un camion qui lui-même est ensuite vidé.

Le conteneur tout comme le camion ne sont donc que des objets de logistiques en transit, entre deux points, entre l’usager et l’usine de tri avant envoi vers son traitement. Il n’est en rien lié au terrain sur lequel il se pose, il ne communique pas avec le sol, ni son odeur, ni son bruit, ni son suintement. La récupération des déchets ménagers ne s’accompagne d’aucune poésie comme si nos déchets n’étaient que des marchandises venues dont ne sait où et allant nous ne savons où.
Pourquoi cet objet n’est-il pas roulant, pourquoi le vider dans un véhicule ? et pourquoi le tri ne s’y opère pas directement ?
Si le conteneur était un dessin animé, pour sûr que comme Wall-e, il ferait le tri et rejetterait au visage de l’usager le mauvais plastique mis au mauvais endroit, et il compacterait au maximum les déchets sur place pour en sortir des ballots.
Nathalia Moutinho